Le locateur, ses employés ou son concierge ne doivent pas entraver la jouissance paisible des lieux du locataire et l’inciter à déménager.
L’article 1902 du Code civil du Québec stipule que :
« Le locateur ou toute autre personne ne peut user de harcèlement envers un locataire de manière à restreindre son droit à la jouissance paisible des lieux ou à obtenir qu’il quitte le logement.
Le locataire, s’il est harcelé, peut demander que le locateur ou toute autre personne qui a usé de harcèlement soit condamné à des dommages-intérêts punitifs. »
La définition de harcèlement reprise dans de nombreux jugements de la Régie du logement est celle donnée par Me Pierre Pratte : « Une conduite se manifestant par des paroles ou des actes et ayant comme conséquences de restreindre, de façon continue, le droit d’un locataire à la jouissance paisible des lieux ou d’obtenir qu’il quitte le logement.(1) »
Chaque cas est donc un cas d’espèce. Habituellement, pour que ses agissements soient considérés comme du harcèlement, le locateur devra avoir eu une conduite fautive pendant un certain temps.
Dans le cadre d’un jugement prononcé le 17 décembre 2010(2), le juge administratif Linda Boucher fait la distinction entre ce qui constitue du harcèlement et ce qui n’en est pas.
Ainsi, l’erreur de bonne foi ou une succession de différends légitimes entre personnes défendant des points de vue opposés ne constitueront pas du harcèlement.
Cependant, l’introduction de huit demandes de reprise de possession sur huit ans dans le seul but d’agacer le locataire et de lui faire perdre son temps et son argent pour, au bout du compte, causer son départ a été jugé comme une forme de harcèlement. De même, le fait, pour un locateur, de déposer des demandes pour non-paiement de loyer alors que ce loyer est retenu pour payer ses créanciers a été considéré comme du harcèlement étant donné que, dans un tel cas, il est clair que la requête sera rejetée.
La défense des droits du locateur et l’exercice de recours légitimes par ce dernier, tels l’introduction de demandes de fixation de loyer suite au refus systématique des augmentations de loyer par un locataire ne peuvent être d’aucune façon assimilées à un comportement fautif.
Par contre, ainsi que l’explique le juge administratif Linda Boucher l’ingérence du locateur « […] ainsi que celle de son acolyte destinée à priver le locataire de la libre jouissance de son logement; leurs insultes et admonestations inopportunes lorsqu’il croise le locataire ou le bruit excessif, constituent certainement autant de gestes de harcèlement.(3) »
Il est à noter que l’article 1902 C.c.Q. ouvre la porte à une demande de dommages punitifs. Le montant de la condamnation à ces dommages varie beaucoup, allant de quelques centaines de dollars à des milliers, selon les faits prouvés. Il est donc essentiel, en cas de demande de dommages punitifs des locataires, de préparer adéquatement la preuve.
(1) Pierre PRATTE, « Le harcèlement envers les locataires et l’article 1902 du Code civil du Québec », (1996) 56 R. du B. 3,6
(2) Pierre Sarault c. Mike Ohana et Wendy Olsenberg, 31 0012118 036 G et 31 020506 240 G, 17 décembre 2010, r. Linda Boucher (R.L.)
(3) Id.