Est-ce qu’il est possible, suite à un jugement résiliant le bail pour non-paiement de loyer et le dépôt d’une demande de rétractation, d’obtenir une ordonnance de forclusion dès le premier jugement qui rejette la demande de rétractation? Est-ce qu’après deux demandes de rétractation et après plusieurs mois de loyer impayé, la Régie du logement ordonnera automatiquement la forclusion?
Le but de l’ordonnance de forclusion est d’empêcher le locataire de retarder indûment l’exécution de la première décision résiliant le bail est d’empêcher que le locateur subisse un préjudice encore plus grand résultant habituellement de plusieurs autres mois de loyer impayés depuis le premier jugement.
La preuve d’antécédents en semblable matière ou un comportement permettant de conclure à l’abus de procédure facilitera l’obtention d’une telle ordonnance.
Est-ce que le simple fait que le locataire ne s’est pas présenté lors de la première audition en résiliation de bail, lors de l’audience portant sur la rétractation et la preuve que le locataire ne paie pas son loyer depuis le jugement qui a résilié le bail, sera suffisant pour l’émission d’une ordonnance de forclusion?
La réponse à la question mentionnée au paragraphe précédent n’est pas claire. Le juge administratif a la discrétion absolue et vous devrez le convaincre de la nécessité d’émettre une ordonnance de forclusion à la lumière des faits particuliers de votre dossier.
Dans le cadre d’un jugement rejetant une demande de rétractation prononcé le 23 mars 2012(1), le locateur avait d’abord obtenu le 20 janvier 2012 un jugement résiliant le bail pour non-paiement de trois mois de loyer totalisant la somme de 1 830 $. Le locataire a demandé la rétractation de la décision le 31 janvier 2012 au motif qu’il avait été empêché de se présenter à la première audience du 18 janvier 2012.
Le tribunal écrit « il appert que le locataire ne se présente pas et qu’il ne délègue pas de représentant lorsqu’il est convoqué en audience. Sa demande de rétractation doublée de son absence injustifiée lors de l’audition portant sur la rétractation apparaît purement dilatoire, donc abusive. Ces manoeuvres ne visent, de toute évidence, qu’à empêcher l’exécution légitime d’une décision. » Le tribunal a émis l’ordonnance de forclusion dans ce dossier.
Dans un autre dossier prononcé le 9 janvier 2012(2), un jugement résiliant le bail pour non-paiement du loyer avait été prononcé en l’absence de la locataire après que sa demande de remise lui ait été refusée. Après avoir rappelé le principe que le refus de la remise demandée par la locataire relevait de l’entière discrétion du juge qui préside le procès, le Tribunal conclut « que les locatrices sont en droit d’obtenir une ordonnance de forclusion, compte tenu du préjudice qu’elles subiront si une deuxième demande de rétractation était introduite à la Régie du logement » étant donné que le loyer demeurait toujours impayé.
D’autres décisions vont dans le sens contraire. Ainsi dans un dossier dont le jugement rejetant la demande de rétractation de la locataire été prononcé le 6 février 2012, la résiliation du bail avait été prononcée et la locataire avait été condamné à payer la somme de 9 000 $ à titre de loyer impayé. (3) La locataire a demandé la rétractation au motif que les documents qu’elle avait eu l’autorisation de produire ne se seraient pas rendus à la juge administrative. La demande de rétractation a été rejetée au motif que la juge administrative « les a reçus en temps opportun et en a tenu compte dans sa décision rendue le 21 décembre 2011 ». Le Tribunal a refusé d’émettre une ordonnance au motif que « s’agissant d’une première demande de rétractation, le tribunal ne croit pas opportun de prononcer à ce stade une telle ordonnance. »
Lorsqu’un locataire fait des demandes de rétractation à répétition, il est habituellement plus facile de conclure à l’abus de procédure et d’obtenir une ordonnance de forclusion.
Dans un jugement prononcé le 23 février 2012(4), le loyer était impayé depuis octobre 2011. Le jugement résiliant le bail avait été prononcé le 6 décembre 2011 pour non-paiement de deux mois de loyer. La locataire en était à sa deuxième demande de rétractation. Elle demandait la rétractation de la décision rendue le 19 janvier 2012 qui avait rejeté sa première demande de rétractation vu son absence à l’audience. La preuve révélait de plus dans ce dossier que la locataire avait été impliquée plusieurs fois dans des litiges similaires et qu’elle multipliait les recours pour entraver l’exécution des décisions rendues contre elle. Dans les circonstances, la preuve révélait clairement l’abus de procédure visant à empêcher l’ordonnance d’éviction et une ordonnance de forclusion fût prononcer.
Il n’est donc pas possible de savoir précisément dans quelles circonstances une ordonnance de forclusion sera émise. Il est donc possible d’obtenir l’ordonnance après une demande de rétractation seulement. Cependant, plus le montant des loyers impayés est important, l’absence du locataire lors des audiences, d’autres décisions impliquant le locataire dans des litiges similaires, favorisera habituellement l’émission d’une ordonnance de forclusion.
(1) Fournier c. St-Laurent 2011 QCRDL 38554, 23 mars 2012
(2) Perron Tardif c. St-Pierre at al. 2012 QCRDL 308, 9 janvier 2012
(3) Montpetit c. Sarina Developpement. 2012 QCRDL 4770, 6 février 2012
(4) Hunt c. FRAD 2012 QCRDL 6675, 23 février 2012