Est-ce qu’annoncer un logement sur Airbnb est légal? Est-ce une bonne idée? Quelles sont les précautions à prendre?
La sous-location
(* Important : voir article sur les nouvelles dispositions concernant le droit du logement)
Un locataire sous-loue son logement lorsqu’il loue à un tiers alors que lui-même cesse d’habiter les lieux. Il demeurera toutefois lié par le bail et responsable des dommages y étant causés et du loyer. La sous-location est utilisée le plus souvent par un locataire qui quitte son appartement pour quelques mois ou semaines, mais qui prévoit revenir au logement par la suite. Règle générale, la sous-location sera faite pour le même loyer que le bail original et le locataire n’en tirera donc aucun profit.
Il convient de souligner qu’un locataire ne peut pas sous-louer son logement sans l’autorisation du locateur. En contrepartie, le locateur ne peut pas refuser la sous-location sans motif sérieux. De plus, un locataire qui sous-louerait pour une période de plus de 12 mois son logement, consécutivement ou non, pourrait être à risque de perdre son droit au maintien dans les lieux et voir son bail non-renouvelé à son échéance[1]. La raison est simple, c’est que le contrat de location est un contrat intuitu personae, ce qui signifie qu’il est relatif à la personne. En bref, le locateur qui a contracté avec un locataire s’attend légitimement à ce que ce soit ce dernier qui habite les lieux, personnellement, et non de purs étrangers.
Ainsi, pour tous les cas de sous-location, l’article 1870 du Code civil du Québec trouve application. Ce dernier énonce ce qui suit :
1870. Le locataire peut sous-louer tout ou partie du bien loué ou céder le bail. Il est alors tenu d’aviser le locateur de son intention, de lui indiquer le nom et l’adresse de la personne à qui il entend sous-louer le bien ou céder le bail et d’obtenir le consentement du locateur à la sous-location ou à la cession.
Lorsque faite de façon temporaire et avec autorisation, la sous-location est tout à fait légale.
Le changement de destination
Lorsque l’on parle d’Airbnb ou de sous-location à court terme ou avec profits, la situation se complique. En effet, dans le cas d’Airbnb, les logements sont souvent loués à court terme (mois de 30 jours) et de façon continue. Les sous-locataires se succèdent, payant un loyer beaucoup plus élevé que le loyer original. Le locataire initial n’habite plus les lieux et tire un profit économique de la situation.
Dans une telle situation, on ne peut plus parler de sous-location, mais bien de changement de destination. Or, un tel changement de votre bail n’est pas permis, tel qu’indiqué à l’article 1856 du Code civil du Québec, et peut mener à la résiliation du bail au tort du locataire. Plus encore, cela peut mener à des problèmes et amendes de la part du gouvernement (ex. Tourisme Québec) ou de la ville.
À titre d’illustration dans Perron c. Uhunmwangho[2], le locateur demandait la résiliation du bail de son locataire, alléguant que ce dernier avait changé la destination des lieux. Dans ce dossier, il a été prouvé que le locataire sous-louait trois chambres dans son appartement, à plus ou moins court terme. Le locateur alléguait, entre autres, que le locataire utilisait les lieux, sans permis ni autorisation, à des fins de villégiature. Or, suite à la réception du recours le locataire avait modifié sa stratégie, louant seulement deux chambres pour pouvoir retourner habiter dans la troisième et limitant sa sous-location à des périodes de plus de 30 jours. Néanmoins, comme il avait continué d’agir sans avis au locateur et à en tirer un profit, le régisseur a conclu, dans ce dossier, à un changement de destination et a résilié le bail.
Plus encore, dans un jugement de la Cour du Québec, Ferrera c. Ciarciello[3], le juge confirme cette interprétation. Dans ce dossier, le locataire portait en appel une décision de la Régie du logement ayant résilié son bail au motif de sous-location sans autorisation. Malgré le dépôt de la demande au tribunal, le locataire avait continué de sous-louer son logement sans autorisation et de façon à générer un profit substantiel. La Régie du logement avait décidé que la situation constituait un changement de destination des lieux et causait un préjudice sérieux au locateur, considérant qu’il ne pouvait plus savoir qui habitait le logement. La Cour du Québec a donné raison à la Régie, déclarant que la décision ainsi rendue était raisonnable.
Précautions
Si vous n’êtes pas locataire, ou si vous l’êtes, mais avez obtenu la permission de votre propriétaire, et que vous voulez absolument louer sur Airbnb, des précautions s’imposent. Vos assureurs doivent être mis au courant, un permis doit être obtenu et des vérifications fiscales et législatives propres à votre situation doivent être effectuées (taxes, impôts et ville). Ainsi, il est à noter que certaines copropriétés interdisent la location d’un condo à court terme. De plus, il n’est pas mauvais de demander un dépôt de sécurité.
[1] Voir notre chronique : La sous-location depuis plus de 12 mois
[2] Perron c. Uhunmwangho, 2017 QCCQ 1974
[3] Ferrera c. Ciarciello, 2017 QCCQ 6462